je retrouve le vélo

avancer en roulant sous le soleil - apprendre à rouler chaque fois - réapprendre à rouler à chaque fois - automatiser débarrer réavancer se décoiffer barrer plus loin finir se coiffer recommencer - la routine et la roue libre


sur la barre de démarrage d’ordinateur c’était écrit que la pluie cessera - en toutes lettres et illustré d’un parapluie fermé - joliment fait - la météo pour sujet d’actualité - pressé sous les yeux - un orage qui court en sous-texte et clic gauche paramètre de la barre des tâches - changer d’cd ou décéder


ouvrir une page blanche de traitement de texte - page blanche dézoomée

















pis zoom





gros plan sur tes yeux quand ils me disent je t’aime - tu me regardes rien écrire

on est demain matin est-ce que Montréal m’a attendue?  - je veux voir ça de mes yeux vus - les sourcils qu’ouvrent grand mes yeux

















POUR UNE FOIS ALLER DANS UN CAFÉ - pour une fois se faire sérieuse avec une boisson chaude - pour pouvoir se dire qu’on a travaillé - mais penser qu’on pense autour : elle pense qu’elle sait écrire parce qu’elle s’accoude à une table de café au-dessus d’un carnet à couverture rigide et d’un stylo à plume - elle se flagelle de saucisse Wiener pour le teint et la fermeté de la peau - ce elle qui est moi - je sais pas j’imagine



(pour la peau ça marche ou c’est la crème ou les deux)



bon et là après un poil de clavardage - se faire dire à l’oreille par une inconnue que les contes se perdent que le moment est venu d’en refaire une batch s’il te plait - parce qu’elle insiste bien s’il te plait - pis de pas les oublier au four - elle rajoute que dehors c’est un four avec un « au fait » - elle demande si j’ai pas une petite pièce - son manteau long sent la pisse de chat - un manteau kakis trop chaud l’été trop froid l’hiver - j’ai pas de pièce je sais même pas si j’ai une pièce mais je dis non comme un réflexe ça sort tout seul et je fouille après en regrettant - j’avais une pièce




rappel : changer cette horrible habitude - d’où elle sort d’ailleurs ?



non peut-être ne m’a-t-elle rien dit d’autre que pour la pièce - j’sais plus - enfin si j’sais mais ça fait mieux - enfin je sais pas en fin de compte - je m’obsède pour des inconnues prédicatrices - pour des voix qui donneraient comme cadeau autre chose qu’un sujet météo - pour m’aider à avancer - nager comme une écrivaine sans publication - as-tu déjà vu un chien nager ?



















c’est un souhait de comptoir rien de plus - une pièce glissée dans la fente d’une fontaine perdue dans le rythme de musiques d’ambiance jazz compilées sur Youtube - chercher un contact avec le monde - chercher un contrat avec le monde - une autre approche - qui est là ? qu’est-ce qu’on me dit ? qu’est qu’on me dit pas ? qui est là sans être là ? qu’est-ce que je rate ? qui je ne vois pas ?



en tout cas ce qui n’a pas été dit n’est pas tombé à coté de mon oreille - les contes se perdent à la vitesse des claques


(les claques se perdent ? vraiment ? faut bien donner des claques pour dire ça)

















se mettre à écrire sur la page dézoomée - peut-être qu’un cactus sortira du soulier de Cendrillon - peut-être - je sais pas faut qu’ça vienne qu’les images prennent vie - faut attendre qu’ça vienne - qu’les prédications se fassent - qu’un conte se chie se pose et s’enroule sur lui-même à fleur de pelouse blanche 



















attendre inspirer l’air froid partir sans se lever


















Y ALLER LES DEUX PIEDS DANS LE TERRIER - bienvenue dedans - prendre des notes cachée dans le décor - retranscrire







devant moi le CONTE QUE VOICI :



















L’interrupteur est là, contre le mur blanc, sali de toutes les mains crasses qui fouinent l’espace avant de l’enclencher. Tu trouves et la lumière fut. Bienvenue dans l’abattoir. Oh non. Un chœur lointain d’Hallelujah accueille tes jambes branlantes de chèvre debout sur une slackline. Au mur : l’hôpital, sans lit, sans télé, sans rien que le carrelage du « nettoyez vos paillasses à la fin du cours ». Un oiseau se cogne sur la vitre de l’intérieur. C’est toi l’oiseau. Espèce d’oiseaux. La lumière s’éteint, le monde a quitté la centrale, il est parti. Tu es l’électricité en barre avec des cheveux sur la tête. Tourne en rond pour faire tourner le monde et paraphe là et là pis signe sur la dernière page, t’auras qu’à glisser le contrat sous la porte. Tourne esti d’calisse.

Tu te vides et deviens plus petit.e que petit.e sur une chaise haute. Tu deviens Lilipuce, une miette de cake à la banane. Personne est venu t’parler aujourd’hui, personne viendra demain. Tu restes sur les photocopies plastifiées et distribuées, dans l’encart du bout du bout, celui caché par le pouce qui tient ça jusqu’à la prochaine poubelle. T’es pas grand-chose, tout juste une empreinte. Chercher dans le dictionnaire et serrer les dents devant le dictionnaire. Tu es nulle part et partout à la fois ou là et à jamais. Tu tournes tu tournes éléctrisé.e.



Fin du conte qui se perd.


















en d’autres mots : crève vite et bien

c’est quoi bien crever si c’est crever ?

confèrent les ballons de baudruche

tu peux crever de regrets et de la déprime du canard noir


mais encore encore ça gratte ça vient ça toque et je rajoute la suite de la toux - je ne peux pas juste en rester là - beaucoup plus à retranscrire :



















Tu avances avec ton toit sur ta tête tes noix sur la tête. La voix dans ta tête te montre la voie de tête. Elle s’exprime en voix de tête. Tu suis, tu hausses les épaules pour des peut-être. Tu es un petit être froid au royaume des sucrettes. Tu voles les cuillères en plastique à la cantine, tu les mets dans ta poche et les oublies le soir. Si on te trouve on te pend pour l’exemple. Jusqu’à ce que tes dents tombent, jusqu’à ce que ta tombe soit partie dans le vent. Tu reçois des compliments sans fond pour la forme, alternés avec des insultes et des regards méprisants. Tu dis pas lesquels tu préfères. Tu n'as pas vraiment le choix, tu reçois comme une urne au milieu du salon, comme un puit sans fond, pas profond, comme un espace qu’on souille par des désirs de toute puissance, sans excuse, sans main, sans le sou. Sous ton verre, pas de sous-verre, tu taches les tables qu’tu trouves dehors à l’abandon, tu les fais vivre pour une fois, l’expérience des ronds tracés à même la surface. Ta voix dans ta tête regarde derrière quand tu marches, elle arrache tes yeux pour les coller par-dessus les cheveux, tu balaies les trottoirs, les mains dans les manches. Tu te promènes les noix sur la tête en fixant l’horizon, le lointain, si tu fixes un point tu ne perdras pas de vue la destination, tu cours un marathon pour lequel t’as jamais eu d’entrainement. Tu te retrouves là, à devoir faire la course avec des bidons d’eau salée, d’un marketing pink-washing. On tape sur les rambardes comme pour t’énerver, pour que tu t’avances comme un taureau dans des rues fermées. Tes sucrettes encore dans les poches, tu les serres comme un trésor ratatiné, un collier fripé à la valeur d’un œil parce qu’il n’y a plus qu’ça que tu laisses. T’es gentil.le mais fais pas trop d’bruit. On pensera peut-être à toi quand on touillera le café, quelques secondes avant la poubelle. Ta voix de tête n’en fait qu’à sa tête. Tu commences à te méfier d’elle. T’as le toupette mou, les tempes qui suent, un dos rappé par les coups de fouet. Mais si tu l’ouvres tu peux entendre « esti’ qu’tu dis des choses dures, sois douce. On dirait qu’t’en veux à la Terre entière ».


















dans le café je ne sais plus ce qui est dedans ou dehors - autofiction le nœud se démêle pas 

un pied là-dedans un autre ici
















fermer les yeux mais c’est encore là - le papier bulle peut bien cacher la machine tranchante mais la centrale électrique est grosse - ça se voit juste en regardant - J’LA VOIS - ON LA VOIT


qui regarde ? regarde regardez regardons ! - les tables à côté regardent vers le bas - MAIS NON C’EST JUSTE LA - le papier bulle cache à peine - le faites pas exprès 




mais on veut pas trop regarder l’intérieur de la centrale - on te donne des leçons pour voir le bon côté d’ta loose - pour te concentrer sur le papier bulle qu’on a mis autour - on est pas si mal dans la cellule à l’interrupteur crasse 


mais toi regarde le monde derrière drette dans les yeux - regarde leurs pieds qu’iels ont dedans - il y a parmi elleux d’autres trajectoires 





CAR IL SUFFIT DE REGARDER CORRECTEMENT pour les voir se démener et dessiner dans le sable tout un autre côté - l’autre côté que celui de la famille Côté 
















tu verras tous ces pieds embourbés qui dansent derrière car rien n’est pavé
 

et tu verras l’autre côté - derrière les murs - les démené.es qui se sortent de l’orbite - ouf merci


car c’est en les regardant que tu verras la porte dérobée -le chemin tout croche derrière le panneau de bois qui fait façade - peinturé en décor réserve naturelle - tu verras la sortie par le cul s’il faut - toujours là où c’est flou




en t’exprimant te répétant répétant explosant t’écoutant - en brisant les parenthèses du conte et levant les points sous lesquels tu te trouves - à force de répéter et répéter et répéter et imploser devant l’espace creusé entre les yeux et les sourcils tu incarnes cet espace - nous sommes cet espace - derrière le papier bulle - derrière la machine tranchante - la troisième dimension de la feuille en papier - parce que personne nait normal allo l’espace bonjour l’espace - sois et dévie la trajectoire vers cet espace ne tourne plus - joue cet espace - modèle-le c’est de la pâte

eh oh salut j’nage là - regarde moi toujours les bras de pantins désarticulés - j’te fais les signes de la noyade au milieu de l’océan - je barbote pour faire des bulles dans le calme plat d’une mer d’huile plate à crever



derrière tes quatres murs - derrière l’interrupteur et le contrat glissé sous la porte - dans la ruelle tu trouveras un toit construit de couvercles - cette décharge est pour toi - tu trouveras un lit et d’autres côtés du lit à apprécier - où l’on dort toustes dans la même merde bien au chaud - une table avec tant de chaises qu’on peut y mettre les pieds 

















pense bienvenu.e sois bienvenu.e

tu sors du conte

tu trouves du terreau - tu fais - et tu racontes

fier.e - débloqué.e - libéré.e devant l’infini

tu es l’épine - nous sommes le cactus dans le soulier de Cendrillon



















MAINTENANT EXPIRER

laisser couler

et s’inscrire dans le mouvement de la porte dérobée



















j’oubliais ma chaise dans le café - le chai latte est froid - ni moi ni le monde n’avons bougé pendant l’envolée - personne n’a vu mon nuage de fumée - mais il était bien là et toi aussi à mes côtés





















c’est surement ça le conte attendu cher zarathoustra au manteau qui sent la pisse de chat 















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